"24 heures"
Ludovic Magnin décrypte le choc des extrêmesAncien défenseur international puis coach du FC Zurich jusqu’à l’an passé, le Vaudois évoque un duel toujours particulier pour lui.
Si la neige le permet, l’indéchiffrable Lausanne-Sport recevra le surprenant leader de Super League qu’est le FC Zurich version André Breitenreiter, ce samedi (18 h) à la Tuilière. Un duel qui s’annonce donc a priori très déséquilibré.
Après une première partie de saison décevante, les Vaudois ne précèdent en effet que le FC Lucerne dans un classement de Super League que dominent les Zurichois en pleine confiance et épatants de constance. En attendant de retrouver un banc, Ludovic Magnin a accepté d’évoquer une rencontre toujours spéciale pour lui.
Son analye après 16 journées
Lausanne: «Le classement actuel du LS (9e) ne m’étonne pas. Parce que la valeur de son contingent le situe à mon avis entre la 7e et la 10e place. Les changements ont été trop nombreux pour qu’Ilija Borenovic puisse bâtir sur ce qui avait été fait la saison dernière. Cet été, le coach a dû repartir de zéro et avec une base beaucoup trop jeune. Une erreur qui a été corrigée en cours de route avec les arrivées de Grippo, Chafik puis Koné. Je remarque d’ailleurs qu’à chaque sortie, la moyenne d’âge de l’équipe augmente.»
Zurich «Cette saison, Zurich est sorti du programme de mon époque, basé sur les jeunes. L’été dernier, le coach a reçu ces renforts indispensables sur les côtés et il a pu se passer de quelques éléments en fin de contrat qui étaient un peu à bout de souffle. Je vois désormais davantage de solidarité au sein du groupe. Mais la clé du succès actuel est le changement de style de jeu de l’équipe. Elle ne cherche plus à avoir la possession du ballon, elle joue plus bas et un jeu de transition d’une efficacité remarquable grâce à des attaquants très rapides.»
Quel est le point fort ou faible de chacun?
Lausanne: «Au LS, le manque d’efficacité est un vrai problème. Dans ce sens, un attaquant d’expérience fait cruellement défaut. Dommage, car un joueur comme Amdouni mériterait d’être mieux épaulé. Il fait partie des plus grands talents du pays, selon moi, mais il joue trop. Il a aussi peutêtre un peu trop de pression et de responsabilités. Sur le terrain, je ne vois toujours pas de vraie ligne directrice. Dans le positif, je mettrai le calme affiché par le club malgré cette situation délicate. Le coach peut, vu de l’extérieur, travailler l’esprit tranquille.»
Zurich: «La confiance qui anime Zurich et le petit nombre de blessés qu’il compte dans ses rangs à l’entame du championnat sont autant d’atouts précieux. Dans le jeu, cette équipe est redoutable lorsque ses attaquants ont des espaces. Sinon, il lui manque un petit quelque chose pour renforcer la défense.»
Quels objectifs finaux?
Lausanne: «Tout est toujours possible dans ce championnat, et le maintien est à la portée du LS. Mais pour cela, il faut que l’équipe réussisse à enchaîner ces deux, trois victoires consécutives qui peuvent la sortir de cette spirale compliquée dans laquelle elle est engluée. Ce qui est possible, car mis à part la lourde défaite contre YB, tous les matches du LS ont été serrés.»
Zurich: «Le FCZ peut rafler le titre en mai! Mais cela dépendra en partie de la façon dont l’équipe gérera une pause hivernale qui risque de briser son élan actuel. Parmi ses rivaux, YB ne me convainc pas cette saison et Bâle a un groupe très fourni, ce qui pourrait poser des problèmes de jalousie à la longue. De plus, les Rhénans devront gérer le cas Cabral. S’il part en janvier, il laissera un énorme vide et s’il reste, le Brésilien sera probablement un peu frustré. Une situation loin d’être simple pour le coach.»
Une surprise est-elle possible samedi?
«Bien sûr. Si le LS peut réaliser un exploit, ce sera sur son synthétique. Pour cela, il faudra que les Vaudois jouent intelligemment en évitant d’attaquer la fleur au fusil pour se faire ensuite piéger en contre. Le FCZ est davantage en difficulté lorsqu’il doit faire le jeu. En revanche, je ne peux pas croire un instant que les Zurichois prendront leurs adversaires un peu à la légère. Ils sortent de deux saisons compliquées, des souvenirs encore trop proches pour qu’ils les aient oubliés. On voit qu’ils ont du plaisir sur le terrain et qu’ils ont envie de le prolonger au maximum.»
Quel mercato en janvier?
Lausanne: «Pour ce qui concerne le LS, cela me paraît assez simple. Le recrutement d’un No 9 d’expérience, ou d’un joueur offensif capable de jouer derrière Amdouni, est indispensable si le club ne veut pas vivre une deuxième partie de saison stressante. Un tel élément permettrait aussi aux autres jeunes attaquants lausannois de se développer et de progresser plus tranquillement.
Zurich: «À Zurich, le sujet est plus délicat. Lorsque j’étais jeune entraîneur, j’ai commis l’erreur de changer un peu mon équipe en hiver alors qu’elle faisait partie du trio de tête. Des ajustements qui ont modifié la hiérarchie dans le vestiaire, ce qui avait engendré un deuxième tour plus laborieux et une petite chute au classement. Dans la situation actuelle, le FCZ ne devrait donc, à mon avis, pas intervenir sur le marché des transferts en janvier. Et si la mécanique reste la même au printemps, le titre ne sera pas une utopie.»
Un pronostic?
«Ce qui est évident pour moi, c’est que ce duel sera beaucoup plus serré sur le terrain que ne peut le laisser penser la différence de valeur et de confiance qui anime aujourd’hui les deux équipes. Cela dit, je vois quand même une victoire zurichoise à la fin. Un 2-1 me semble envisageable.»
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